Beatriz Trepat à Douai

L'Ecole d'Art de Douai consacre une exposition à Beatriz Trepat aussitôt fermée après son ouverture le 13 mars. Découvrez la ici

dossier préparé avec l'Ecole d'Art de Douai que nous remercions vivement

 

"Je crée des personnages qui évoquent des organismes non identifiés de la nature.
Ils échappent aux catégories : végétal-animal-minéral, en perturbant les frontières établies.
Ils unifient les paires opposées (dur/mou, sec/humide, lisse/rugueux...)
Ils évoquent des sensations tactiles et génèrent en même temps une ambiguïté."
janvier 2018

 

Née en 1965 à Rosario (Argentine), Beatriz Trepat s'est formée en gravure et en céramique en Argentine. Elle a ensuite poursuivi sa formation à l'école de tournage céramique d'Augusto Tozzola à Arcueil, puis s'est consacrée au calcul d'émaux auprès d'Héléna Klug à Paris. Sa recherche actuelle porte sur des pièces construites par inclusions d'éléments cuits dans la terre crue. Depuis 1988, Beatriz Trepat vit en France et travaille en région parisienne.

 

 

Il y a déjà une dizaine d’années, Beatriz Trepat a dévoilé ses premières céramiques : des contenants polis, de terres mêlées, de faïence au grain délicat et aux courbes douces et caressantes.

Leur succédèrent des coupes, des bols, des vases, des crânes ; aux couleurs soyeuses et acidulées, ornés de petites pastilles par millier, finement ouvragées, tels des objets de culte baroques.

A travers cette exposition présentée à l’école d’art de Douai, Beatriz Trepat livre ce qui semble relever de l’invisible à l’œil nu. C’est une parade de créatures -minuscules, petites voire moyennes- qui se déploie ; un observatoire d’êtres incarnés, inédits…

Bactéries, champignons, protozoaires, algues vertes, plancton ou amibe… comme si toutes les formes de vie se manifestaient à travers les différents langages techniques et plastiques de la céramique.

Argile cuite et crue se marient, couleurs et matières s’affrontent, rebus et ornements s’équilibrent, orthodoxie technique et aléatoire facétieux se taquinent.

Ces sculptures hybrides interrogent le spectateur indécis. Serait-il question de nature ou d’artifice ? Comment le réel le dispute-t-il à l’imaginaire ?

Comme le titrait joliment un article de la RCV en 2017, Beatriz Trepat nous révèle la grandeur de l’infiniment petit.

Amélie Vilgrain directrice de l'Ecole d'Art de Douai

 

exposition prévue du 13 mars au 2 mai 2020 (prolongation jusqu’au 30 mai)
stage avec l'artiste du 7 au 10 avril 2020 (reporté, date non déterminée

 

Beatriz Trepat EAD Douai

texte de Beatriz Trepat

Objet de vitrine – Exposition Ecole Manuel Musto, 2015

La catégorie "Objet de vitrine" désigne de petits objets décoratifs ou d'un ornement, d’une qualité artistique et une valeur élevée, réalisés souvent dans des matériels nobles.

Certains sont fabriqués pour être exhibés et sans un but pratique; ils finissent exposés dans des meubles, à cause de leur délicatesse ou leur valeur sentimentale ou économique.

À la fin des années '80 j'ai réalisé une série de petites pièces.

Dans ce moment j’assistais à l'atelier de Dante Alberro, où je faisais des recherches sur les engobes et les émaux. Au lieu de faire faire des échantillons, il me semblait plus intéressant de faire les essais "en direct" sur des miniatures.

Celles-ci tenaient dans une main ; la taille et la forme étaient celle d'un œuf. Il y avait une claire référence à la poterie, puisqu'elles avaient des anses, des becs, des couvercles et parfois des bouchons de liège taillés sur mesure.

La plupart étaient peintes avec des engobes, polies et décorées avec des entrelacs minutieux qui couvraient toute la surface.

Javais aussi expérimenté des mélanges de terres et de métaux.

C'était des pièces intimistes que à ce moment je ne pensais pas montrer.

En 1988, Dante a eu l'initiative de les exposer dans l’école Musto, où il était professeur de céramique.

La "mise en scène" était sur une grande table, protégée par une vitrine. Chaque œuvre avait une base en bois et en trois plus petites pièces "déambulaient". L'exposition dans l’exposition.

Toutes ces années, j'ai continué de faire des miniatures qui portent l'ADN de celles de 1988.

Maintenant ce sont des personnages qui évoquent des organismes non identifiés de la nature ou les restes archéologiques que j'aimerais trouver et garder précieusement.

Elles échappent aux catégories végétal - animal - minéral, en perturbant les frontières établies.

Elles unifient les paires opposées (dur / mou sec / humide …) renvoient aux images tactiles et en même temps génèrent une ambiguïté supplémentaire : c'est un hybride, sont-ils deux personnages ?

Commencement d'un nouveau cycle ou un vestige du précédent ?

Beatriz Trepat

texte de Beatriz Vignoli

Oh, regardez la spirale ! On dirait un être vivant.

Gregory Bateson, Esprit et nature

 

La vie dans les planètes. Présentation de Beatriz Vignoli

 

Il y a vingt ans, Beatriz Trepat est arrivée à l'atelier de Dante Alberro pour se former à la céramique. Elle sortait alors de l'École des Beaux-Arts de la ville de Rosario (Argentine), avec une spécialisation en gravure, une discipline où la copie et la reproduction sont essentielles. Elle a transposé la poésie du dessin à la sculpture et en suivant le principe du calque, elle a créé, à la manière de l'ADN ou du fossile, une trace du vivant.

Beatriz Trepat s’est donc d’abord lancée dans la reproduction fidèle de petits simulacres de créatures, en façonnant des espèces, des familles, des colonies et des récifs de quelques spécimens proliférants à la surface d'un objet prétendument usuel : ici, un vase baroque se trouvait assailli par l'invasion d'une faune de cadavres mythologiques ; là encore, c’est une urne funéraire qui fleurissait, comme un désert après la pluie.

La clé en était la rose : c'est, tout simplement, à partir d'une minuscule rose, trouvée et transformée par la magie de l'argile en proto-animal répliqué à l'infini, que cette artiste eut l'intuition de la morphologie hélicoïdale du vivant. La forme du vivant, selon Bateson, c'est "comme la musique, des répétitions avec modulations”. La forme du vivant raconte toujours une histoire, elle laisse des traces de sa croissance dans les systèmes auto-régulés. Le vivant "grandit en conservant sa forme" (Bateson), la spirale donne forme à son exemple le plus parfait : la rose.

Un jour, l'habit d'argile a implosé. Alors qu'un vide conçu pour former un récipient circonscrivait ses œuvres précédentes, Beatriz Trepat a oublié la fonction d'usage. Des amphores et des cruches se sont métamorphosées en quelques rares individus d'une espèce encore inconnue : de tendres monstres sui generis, singuliers et sans pareil.

Le décor de brocart constitué par ces colonies de micro-organismes est devenu la peau ou encore l'écorce d'entités au règne inconnu. Les pointes et les épines ont vu leurs formes simplifiées. Ce n'est plus d'une matrice en amont qu'elles surgissent comme au hasard, mais des doigts de Beatriz qui les pétrie une par une, grâce à son sens du sculptural, émancipé de la gravure et du collage.

Elles ne racontent plus un roman fossile, qui traversait les générations pour donner à voir l'histoire et le tissu vivant d’une biodiversité sociale, où cohabitaient des existences diverses en ordre chaotique. Elles sont désormais réduites à un seul geste, une pointe d'humour, un witz.

L'argile cuite fige l'image d'un instant dans la vie d'un animal venu des étoiles.

Ce que dégage le personnage nous fait entrevoir tout un monde. La dramaturgie s'empare du récit, le geste se répand en un théâtre miniature, en un diorama accueillant où la créature, sortie d'un univers fort mystérieux, apaisera son exil.

Une sculpture née de la gravure rejoint son autre versant : la peinture. Créer un décor pour cet animal naissant, c'est lui inventer un univers au sein duquel la toute première distinction se fera entre l'humide et le sec. Après la simulation des restes génétiques d'un emporium perdu, Beatriz Trepat a entrepris d’écrire une Genèse originale, peuplée d'êtres surgis des eaux qui s'épanouissent en pleine lumière.

 

biographie

Beatriz Trepat

Née en 1965 à Rosario (Argentine).

Formation en gravure et céramique en Argentine

EXPOSITIONS

2020 ‘Carte Blanche’ Ecole d’Art de Douai, France

2019 Galerie Tokonoma, Paris, France

2019 ‘Ceramics in Love’, Castellamonte, Italie

2019 ‘Natura Ibrida’ Centre Céramique Contemporaine de La Borne, France

2018 Galerie associative, Beauvais, France

2018 Céramique 14, Paris, France

2018 Galeria Dawa, Buenos Aires, Argentine

2018 ‘Fricciones’ Galeria Subsuelo, Rosario, Argentine

2018 St Sulpice, Journées de la Céramique, Paris, France

2018 La plus petite galerie au monde, Roubaix

2018 Biennale Céramique, Château La Roche Guyon

2018 ‘Renêtre’, Ecole EAC, Paris, France

2018 Festival de Céramique Terramicales, Paris

2017 Galerie terres d’Aligre, Paris, France

2017 Galerie Terra Viva, St Quentin la Poterie, France

2017 Galeria Subsuelo, Rosario, Argentine

2017 Ōtawara Institute of Cultural Studies, Ōtawara, Japon

2017 St Sulpice, 20e Journées de la Céramique, Paris, France

2017 Assemblage #4, Julio Artist-run space., Paris

CONCOURS

2016 1er prix, XXVIII Salón de Pequeño formato, Tucumán, Argentine

2016 Best of the show ‘Miniatures and Jewelry’, Las Vegas, USA

2015 1er Premio 56 èmè Salón Anual Internacional CAAC, Bs As, Argentine

2015 Mention, 104° Salón Nacional de Artes Visuales, Buenos Aires, Argentine

2015 Best of the show ‘Crave the cup’, Las Vegas, USA

2015 1er prix concours ‘L’Urne’, VIA, Vallauris, France

2013 Honorary mention, Cluj International Ceramics Biennale, Roumanie

RESIDENCES

2019 Shigaraki Ceramic Cultural Park, Japon

2017 Ōtawara Institute of Cultural Studies, Ōtawara, Japon

2016 VIA, Vallauris, France

 

 

 

Beatriz Trepat dans la Revue de la Céramique et du Verre

RCV BEATRIZ-TREPAT.pdf (156.3 Ko)

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Commentaire de Beatriz Trepat | 26.04.2020

Cher Bernard,
Je suis très heureuse que vous ayez pris le temps de présenter mon expo, d'autant plus qu'elle n'est pas restée ouverte au public du fait de la situation exceptionnelle.
Merci donc pour votre soutient, qui montre bien votre passion pour la céramique, et merci aussi à Catherine Petit pour l'intérêt qu'elle montre à mon travail.
Beatriz

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