les céramiques de Fontana chez Karsten Greve

Installation view, Lucio Fontana Ceramics, Galerie Karsten Greve Cologne, 202021. Photo Nicolas Brasseur

Karsten Greve a rassemblé un ensemble magistral des céramiques de Lucio Fontana.

Il les expose depuis 1977dans ses galeries. Il leur a consacré de passionnants catalogues

 

Une sélection était visible à Paris en automne 2020.

Depuis le 28 novembre et jusqu'au 27 février,  la galerie de Cologne présente un panorama  de portée historique qui montre que l'artiste a pratiqué la céramique tout au long de sa carrière. Elle accompagne l'évolution de ses recherches et constitue une source d'inspiration et d'expérimentation déterminante.

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"La Galerie Karsten Greve a le plaisir de présenter Ceramics, une exposition des travaux en céramique du précurseur Lucio Fontana (1899-1968). Maître de l’abstraction, connu internationalement pour ses toiles fendues, les Tagli, c’est pourtant la céramique, dont il a profondément renouvelé le médium tout au long de sa carrière, qui occupe la plus grande place dans sa pratique. La présente exposition met en regard la diversité de ses productions à travers des œuvres emblématiques ou longtemps restées discrètes aux yeux du public. Dans cette sélection de sculptures réalisées entre 1936 et la fin des années 1950, le spectateur pourra ainsi jouer des corrélations entre les céramiques avant-gardistes et biomorphiques, abstraites et figuratives, aux sujets profanes ou religieux.

Dès 1930, à Milan, Fontana s’éloigne de la sculpture classique et de la taille du marbre, et privilégie le modelage pour donner forme à des œuvres plus intuitives et expressives. Ses premiers reliefs et sculptures en terre cuite, en plâtre ou en céramique sont des portraits et corps nus au style figuratif dit « primitif ». Les figures à l’aspect organique et brut annoncent les œuvres caractéristiques du milieu des années 1930, représentant des animaux et fonds marins pris dans un magma rocheux.


Une décennie plus tard, Fontana revendique son lien avec la matière dans son premier manifeste, le Manifiesto blanco, qui établit les fondements du spatialisme. La plasticité de la céramique incarne les principes qu’il privilégie pour la création d’un art nouveau qui « tire ses éléments de la nature » : « L’existence, la nature et la matière forment une unité parfaite. Elles se développent dans le temps et dans l’espace. Le changement est un caractère essentiel de l’existence. Le mouvement, la capacité d’évoluer et de se développer sont les propriétés fondamentales de la matière. Celle-ci existe en mouvement et d’aucune autre façon. » Manifiesto blanco, 1946


L’argile représente pour Fontana la matière ouverte au dynamisme et aux changements. Passionné par les innovations scientifiques de son siècle et marqué par le mouvement futuriste, le sculpteur s’empare avec la céramique d’une tradition antiqueet fait fusionner le passé et le présent. Ses œuvres sont volontairement anachroniques : Fontana emprunte à un répertoire traditionnel et aux formes de l’art sacré, mais en les associant à sa réflexion spatialiste sur l’infini.


Les sculptures de Batailles, de Crucifixions et de Vierges à l’enfant reflètent cette volonté ; les effets de mouvance de la matière produisent des reconstitutions métamorphiques et s’apparentent à des organismes en mutation. La préoccupation de Fontana pour le divin est liée aux enjeux sociétaux de l’époque et à la conquête de l’espace qui le fascine. Si la thématique religieuse traverse son œuvre, l’artiste déclarera à la fin de sa vie, qu’il est impensable de croire aux dieux sur terre, « les religions doivent se tenir au courant des découvertes scientifiques […] L’homme va dans l’espace et il voit qu’il n’y a pas de Paradis ».

Ce désir d’expansion s’applique aux sculptures de Fontana, qui dépassent les frontières de la figuration. Ainsi, les Christs et les personnages de la Commedia dell’arte sont enfouis dans les plis de la matière. Les mouvements de torsion de l’argile provoquent un débordement qui dévoile une spatialité baroque. Cette sensualité du geste se retrouve dans une autre facette de l’œuvre de Fontana, les BuchiTrous »), où le sculpteur vient poinçonner et fendre la surface lisse de la terre. « Ces trous étaient mes idées » explique Fontana, qui produit une quantité de variations de perforations, formant spirales et constellations. Les surfaces des Buchi renvoient à l’aspect atomique de la matière.

De même qu’en 1959, avec les Natura, terres cuites imposantes aux formes sphériques entaillées ou creusées, Fontana est en lien direct avec l’actualité et s’inspire des premières images de cratères de la Lune. L’ambiguïté de la nature de ces œuvres, organiques ou façonnées par l’homme, correspond à l’engouement de l’artiste pour les gestes premiers. Aux fondements de l’art spatialiste, l’artiste invoque les gestes des hommes de la préhistoire, qui « poussés par la puissance suggestive du rythme, […] durent danser jusqu’à l’ivresse. Tout était sensation chez les hommes primitifs. Sensations face à la nature inconnue, sensations musicales, sensations du rythme » - et de conclure au manifeste : « Notre intervention est de développer cette condition originelle de l’homme ».Ainsi, entre volonté de retour aux sources et impétuosité du geste, on assiste chez Fontana à une même exaltation d’ordre sensoriel d’animer, de rompre et de perforer la matière.


Lucio Fontana est né en 1899 à Rosario, une ville de province d’Argentine. Il se forme d’abord au savoir-faire académique auprès de son père, spécialisé dans la sculpture funéraire, puis auprès de son maître, le symboliste Adolfo Wildt à l’Accademia di Brera. Cependant, il tente rapidement d’opérer une rupture avec la sculpture classique : dès 1930, à Milan, la ville du futurisme, il favorise le contact direct avec la matière. Il expose alors à la cosmopolite Galleria del Milione des reliefs et sculptures aux figures archaïsantes, en terre cuite, en plâtre ou en céramique. Il fait de la céramique son matériel de prédilection, qui le restera jusqu’en 1960. Il en exploite ses infinies possibilités, d’abord à la Manufacture de Sèvres en 1937, puis à l’atelier de son ami le céramiste futuriste Tullio Mazzotti à Albisola, où il réalise des céramiques biomorphiques phosphorescentes. En 1947, de retour à Milan, Fontana est reconnu en tant que fondateur et leader du mouvement d’avant-garde du spatialisme. Il met en pratique ses manifestes spatialistes en opérant une nouvelle rupture avec le cadre du tableau et attribue à ses œuvres, peintures comme sculptures, le titre de Concetto spaziale (Concept spatial). Il réalise alors les Buchi (« Trous »), surfaces aux couleurs vives percées et déclinées sur toile, terre ou métal. Sa préoccupation pour le dynamisme de la matière se retrouve à cette même période, et jusqu’en 1950, dans sa production faisant écho à l’iconographie traditionnelle italienne ainsi qu’à l’art sacré, notamment avec sa série de Crucifix.


Toujours avec cette volonté d’échapper au cadre du tableau, il acquière une grande reconnaissance avec les Tagli, fentes percées dans la toile. Très reconnu en Italie, ce n’est qu’en 1948, lors de la Biennale de Venise que Fontana connait une consécration internationale. La même année il est exposé à New York, Osaka, Copenhague, Buenos Aires, Cincinnati, Pittsburgh et à la Documenta de Kassel l’année suivante. Après son décès en 1968, de nombreuses expositions posthumes lui sont consacrées : au Centre Georges Pompidou en 1987, au Museum Moderner Kunst Stiftung Ludwig à Vienne en 1996, à la Hayward Gallery à Londres en 1999, au Solomon R. Guggenheim Museum à New York en 2006, à la Galleria Nazionale d'Arte Moderna e Contemporanea à Rome en 2008.

La Galerie Karsten Greve expose les œuvres de Lucio Fontana depuis 1977. En 2014 à l’occasion de la rétrospective de Lucio Fontana au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, Karsten Greve fait découvrir sa prestigieuse collection de céramiques dont il présente également de nombreuses
pièces en 2019 au Metropolitan Museum of Art à New York et au Multimedia Art Museum de Moscou.

GALERIE KARSTEN GREVE

Nous remercions la galerie Karsten Greve qui nous autorisés à reproduire ces informations et ces photos

 

 

l'exposition de Cologne

pour découvrir l'exposition de Cologne (avec une très belle vidéo à ne pas rater)

 

https://galerie-karsten-greve.com/en/exhibitions/detail/2422-ceramics

cliquez sur les photos pour les agrandir et voir les légendes

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